Problèmes liés à la santé mentale au travail (Bourbonnais et Coll., 2005)

 mars 2008
par  Jean Heutte
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Quelques modèles pour l’analyse des risques psychosociologiques et la dégration de la santé mentale au travail.

Les problèmes de santé mentale constituent l’un des problèmes de santé les plus fréquents, coûteux et invalidants dans la population en âge de travailler. Plusieurs études ont documenté l’effet des contraintes psychosociales au travail sur la survenue des problèmes de santé mentale (Peter, 2002 ; Peter et al.,2002 ; van der Doef & Maes, 1999 ; van der Doef, Stan & Diekstra, 2000).

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L’identification des modifications requises à l’organisation du travail pour réduire les contraintes psychosociales du travail et leurs effets néfastes sur la santé physique et mentale repose sur deux modèles théoriques appuyés par le plus grand nombre d’études empiriques : le modèle « Demande-Latitude » de Karasek et le modèle « Déséquilibre Efforts/Reconnaissance » de Siegrist (Schnall, Belkic, Landsbergis & Baker, 2000 ; Siegrist, 2002 ; van der Doef & Maes, 1999).

Les deux composantes principales du modèle de demande‑latitude sont la demande psychologique (quantité de travail, exigences intellectuelles requises et contraintes de temps) et la latitude décisionnelle (utilisation et développement des compétences et contrôle sur le travail qui implique l’autonomie dans le travail et la participation aux décisions). Selon ce modèle, une tension au travail survient lorsqu’une demande psychologique élevée s’accompagne d’une faible latitude décisionnelle. Ces contraintes ont été associées à une série d’effets sur la santé physique et mentale (Bourbonnais, Brisson, Vézina & Moisan, 1996 ; T. S. Kristensen, 1996 ; Stansfeld, Fuhrer, Shipley & Marmot, 1999). Une troisième composante a été ajoutée au modèle pour tenir compte du soutien social des collègues de travail et des superviseurs (Johnson & Hall, 1988) qui modifierait l’association entre la tension au travail et la survenue de problèmes de santé.

Le modèle de déséquilibre efforts/reconnaissance de Siegrist est centré sur le déséquilibre entre les efforts fournis au travail et la reconnaissance obtenue (l’estime, le respect et le contrôle sur son statut professionnel (rétribution monétaire, perspective de promotion et sécurité d’emploi) (Marmot, Theorell & Siegrist, 2002 ; Siegrist & Peter, 2000 ; Siegrist, Peter, Junge, Cremer & Seidel, 1990). Les effets néfastes du déséquilibre efforts/reconnaissance ont également été observés au plan émotionnel et physiologique (Niedhammer & Siegrist, 1998 ; Peter, 2002 ; Siegrist, 2002).

En plus des quatre contraintes psychosociales du travail impliquées dans les deux modèles précédents, Kristensen suggère de mesurer également deux autres dimensions qui auraient des répercussions sur la santé : le sens du travail et le degré de prévisibilité au travail. Le sens du travail réfère au fait d’aimer son travail, d’y croire et d’en être satisfait (Kristensen, 1999). La prévisibilité au travail fait référence à une connaissance minimale des informations importantes concernant le travail (Kristensen, 1999). Cette dimension représente un lien concret avec les différentes théories du changement organisationnel et de l’importance de la communication dans les organisations pour « savoir ce qui nous attend » (Mayrand Leclerc, 2001).


Source :
Bourbonnais R., Gauthier N., Vézina1 M., Viens C., Durand P. J., Brisson C., Alderson M., Bégin P., et Ouellet J.-P. (2005). Une intervention en centres d’hébergement et de soins de longue durée visant à réduire les problèmes de santé mentale liés au travail , PISTES © Vol. 7 No. 2 Mai 2005 — Recherche http://www.pistes.uqam.ca/v7n2/arti...