Mise en évidence du flow perçu par des étudiants au cours d’un travail collectif : l’homo sapiens retiolus est-il un épicurien de la connaissance ? (Heutte, 2010)

 mai 2010
par  Jean Heutte
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approches transversales et disciplinaires

Dans le souci d'identifier les conditions qui caractérisent les moments décrits par les gens comme étant parmi les meilleurs moments de leur vie, Csikszentmihalyi (1975) a interrogé des alpinistes, des joueurs d’échec, des compositeurs de musique et d’autres personnes qui consacrent beaucoup de temps et d’énergie à des activités pour le simple plaisir de les faire sans recherche de gratifications conventionnelles comme l’argent ou la reconnaissance sociale. Les résultats de ces recherches lui ont permis de définir le concept de l’expérience optimale, qu’il appelle "flow" (Csikszentmihalyi, 1990), et qui réfère à l’état subjectif de se sentir bien (Csikszentmihalyi & Patton, 1997). Ces grands moments de la vie surviennent quand le corps ou l’esprit sont utilisés jusqu’à leurs limites dans un effort volontaire en vue de réaliser quelque chose de difficile et d’important. L’expérience optimale est donc quelque chose que l’on peut provoquer... Pour chacun, il y a des milliers de possibilités ou de défis susceptibles de favoriser le développement de soi (par l’expérience optimale). » (Csikszentmihalyi, 2004, p24). L’expérience optimale comporte 8 caractéristiques majeures (cf. tableau 1).

L’expérience optimale apparaît, entre l’inquiétude (l’anxiété) et l’ennui (cf. figure 1, p 2), lorsqu’il y a une correspondance adéquate entre le défi (les exigences de la tâche) et les capacités de l’individu. L’expérience optimale rend l’individu capable d’oublier les aspects déplaisants de la vie, les frustrations ou les préoccupations. La nature de l’expérience optimale exige une concentration totale de l’attention sur la tâche en cours, de sorte qu’il n’y a plus de place pour la distraction. L’expérience optimale entraîne des conséquences très importantes : meilleure performance (Jackson, Csikszentmihalyi, 1999 ; Demontrond-Begr et Fournier, 2003), créativité, développement des capacités, estime de soi et réduction du stress (Csikszentmihalyi, 2006).



Tableau 1. Les caractéristiques de l'expérience optimale - flow (d'après Csikszentmihalyi, 1990, p49).

F1

Défi et habilité

« We confront a task we have a chance of completing »

F2

Concentration

« We must be able to concentrate on what we are doing »

F3

Cible claire

« The task has clear goals »

F4

Rétroaction

« The task provides immediate feedback »

F5

Absence de distraction

« One acts with a deep but effortless involvement that removes from awareness the worries and frustrations of everyday life »

F6

Contrôle de l'action

« People can exercise a sense of control over their actions »

F7

Perte de conscience de soi (...mais paradoxalement, le sens de soi se trouve renforcé)

« Concern for the self disappears, yet paradoxically the sense of self emerges stronger after the flow experience is over »

F8

Altération de la perception du temps

« The sense of the duration of time is altered ; hours pass by in minutes, and minutes can stretch out to seem like hours »

Il s’agit d’un état dynamique de bien-être, de plénitude, de joie, d’implication totale. « La combinaison de ces éléments se traduit par un si gratifiant sentiment de profond bien-être que le seul fait de pouvoir le ressentir justifie une grande dépense d’énergie » (Barth, 1993). Ce sentiment crée un ordre (harmonie) dans notre état de conscience et renforce la structure de soi.


Lorsque qu’une personne est capable d’affronter la vie avec un enthousiasme tel qu’elle s’implique dans ce qu’elle fait avec une grande ferveur, on peut dire d’elle que c’est une personnalité autotélique1. Une activité est autotélique lorsqu’elle est entreprise sans autre but qu’elle-même. Bien sûr, personne n’est à cent pour cent autotélique car nous sommes tous obligés, par nécessité ou par devoir, de faire des choses qui ne nous plaisent pas. Mais on peut établir une gradation entre les gens qui n’ont presque jamais l’impression de se faire plaisir et ceux qui considèrent presque tout ce qu’ils font comme important et valable en soi. C’est à ces derniers que s’applique le terme autotélique (Csikszentmihalyi, 2005).

Le flow dans les environnements numériques : « Time flies when you're having fun... »

De longue date, la plupart des tentatives d'explications du comportement individuel des utilisateurs de technologies de l'information et de la communication (TIC) ont tendance à se concentrer essentiellement sur les croyances de maîtrise instrumentale, pour comprendre leurs intentions d'usage des TIC. Cependant, des travaux récents dans le champ de la psychologie positive (Seligman, 1998 ; Seligman et Csikszentmihalyi, 2000) suggèrent que dans l'expérience globale avec la technologie, des concepts comme l'enjouement et le flow sont des variables explicatives potentiellement importantes dans les théories d’acceptation de l'usage des technologies (Agarwal et Karahanna, 2000). Duke et coll. (2007), Pearce et coll. (2005) font état du grand intérêt et du caractère prometteur des recherches concernant le flow dans les environnements numériques. En effet, le flow est une variable évoquée pour comprendre les expériences positives avec ordinateurs (Ghani, 1995; Ghani et Deshpande 1994 ; Ghani et coll., 1991 ; Trevino et Webster, 1992 ; Webster et coll., 1993), et plus récemment, pour ce qui concerne l'usage d'Internet (Chen, 2000 ; Chen et coll., 1999 ; Hoffman, Novak 1996 ; Novak et coll., 2000). Cette théorie a notamment été utilisée, afin de mieux appréhender l'absorption cognitive (Agarwal, Karahanna, 2000) pendant les activités d'exploration (Ghani, 1995 ; Ghani et Deshpande, 1994 ; Webster et coll., 1993), de communication (Trevino et Webster, 1992), et d'apprentissage (Ghani, 1995).

La majorité des recherches (Chen, 2000 ; Chen et coll., 1999 ; Ghani et Novak, Hoffman, 1997 ; Seikpe, 2005 ; Sénécal et coll., 2002 ; Trevino et Webster, 1992 ; Webster et coll., 1993) adoptent une vision multidimensionnelle du concept de flow. Les construits communément cités comme reliés à l’état de flow sont l’euphorie, la concentration, le contrôle, les enjeux et la curiosité (Ettis, 2005). Cependant, la modélisation du flow dans les environnements numériques n'est pas stabilisée.

Compte tenu de cette multitude de modèles et du fait qu'aucun ne semble spécifiquement adapté aux environnements d'apprentissage collectif, nous n'en privilégierons aucun dans cette approche exploratoire2 : nous nous limiterons à la mise en évidence du flow perçu par des étudiants dans un environnement numérique de formation.



Recherche d'un écosystème favorable au déploiement de l'apprenance.

Selon Bouchet (2005), depuis 1995, pour la Communauté européenne, l’enjeu du XXIè siècle, c’est le passage à une société cognitive, « une société qui saura investir dans l’intelligence ». La tentation est forte de lier comme une évidence l'omniprésence grandissante du numérique et l'avènement de la société de la connaissance. Cependant, même si le développement des TIC rend l'information et la connaissance accessibles dans des conditions inégalées, le projet de la société cognitive repose sur la mobilisation de l'individu appelé à devenir sujet social apprenant (Dumazedier, 2003, cité par Carré, 2005). Cet enjeu replace de manière plus criantes et actuelles les inégalités dans le rapport au savoir : on ne produit ni le goût, ni l'art d'apprendre par décret (Carré, 2006). Pour Trocmé-Fabre, « le mot "apprentissage" doit céder la place au mot "apprenance", qui traduit mieux, par sa forme même, cet état d'être-en-train-d'apprendre (Trocmé-Fabre, 1999). Selon Carré (2003), le passage d’une société de l’information à une société cognitive ou apprenante repose en grande partie sur une dynamique d’apprenance, qu’il définit comme un « ensemble stable de dispositions affectives, cognitives et conatives, favorables à l'acte d'apprendre, dans toutes les situations formelles ou informelles, de façon expérientielle ou didactique, autodirigée ou non, intentionnelle ou fortuite » (Carré, 2005).

Cependant, ces compétences indispensables pour vivre et travailler dans ce qu'il est convenu d'appeler l'économie de la connaissance correspondent à des caractéristiques dispositionnelles qu'il semble difficile de construire exclusivement via des dispositifs de formation académiques (Heutte, 2007).

Un nouvel Homo ? Plaidoyer pour un néologisme.

« Une des lignes de clivage les plus tenaces à l’intérieur du domaine des sciences sociales est celle qui oppose deux formes de pensée que l’on associe respectivement aux noms de Smith et de Durkheim : c’est l’opposition entre Homo œconomicus et Homo sociologicus. » (Elster, 1988, cité par Dupuy, 1999). Godbout (2000), quant à lui, propose un véritable paradigme alternatif. Dans Le Don, la dette et l'identité, Homo donator vs. Homo œconomicus, il affirme que si les réseaux fonctionnent bien, cette dette est positive, elle n’engendre pas angoisse et aliénation, mais confiance et désir de loyauté. Poursuivant la question de Thaler (2000), nous nous interrogeons : « Peut-on élaborer des modèles économiques à partir d’un homo œconomicus moins rationnel et plus émotionnel, autrement dit à partir de l’homo sapiens. », tout en gardant à l’esprit la part croissante de l’immatériel dans l’économie (qui repose sur le savoir et la connaissance), l’importance de la création collective de valeur (qui repose sur des réseaux humains/réseaux de confiance) et les opportunités nouvelles liées à l’omniprésence des réseaux numériques ?

En effet, via les réseaux numériques, homo sapiens a la possibilité d’être pratiquement en permanence en contact avec des ressources (le plus souvent numériques) et un réseau humain formel ou informel potentiellement co-constructeur de connaissances.

Autrement dit, la capacité d'un hominidé à utiliser de façon raisonnée toutes les technologies qui sont à sa disposition, notamment, de créer de la valeur, en interaction avec des réseaux de pairs et d’experts, via les réseaux numériques définit l’émergence d’un nouvel Homo que par commodité nous avons choisi provisoirement d’appeler Homo sapiens retiolus3 (Homme qui « pense en réseau ») (Heutte, 2005).

Un environnement d’apprentissage en communautés virtuelles.

Ouvert depuis 1998, le campus virtuel des TIC de l'université de Limoge s (CVTic)4 forme plusieurs milliers d'étudiants francophones, disséminés sur plusieurs continents, aux métiers de la net-économie. Dans ce cadre, ils doivent résoudre, à distance, en équipe, souvent au-delà du prescrit, des problèmes complexes, très proches de situations professionnelles réelles. CVTic se veut résolument centré sur celui qui veut se former et ceux qui peuvent accompagner/favoriser/faciliter ces apprentissages (Heutte et Casteignau, 2006). En effet, selon Carré (2005), l'avènement de la société de la connaissance marque un changement de posture et apporte un regard inversé sur la relation du sujet, adulte en particulier, à la formation et au savoir. Il s’agit moins de se demander « quelle pédagogie, quelle formation, quel savoir… peut-on apporter aux formés cibles d’un dispositif de transmission de savoir ? », mais plutôt :

  • Comment les apprenants, agents majeurs de leur propre formation, vont-ils s’approprier les ressources qui leur sont proposées ?

  • Comment donner aux apprenants la place et les moyens d’assumer une large part de responsabilité dans le pilotage de leur formation ?


Dispositif d’étude et démarche méthodologique

L’écosystème5 particulier créé par CVTic a été l’objet d’une étude ethnographique (Heutte, 2005) sur les conditions de « déploiement d’une écologie de l’apprenance » (Carré, 2005). Dans le biotope expérimental constitué par l'espace de formation réunissant les étudiants inscrits au DESS "communautés virtuelles et management de l'intelligence collective via les réseaux numériques", les observations se sont focalisées principalement sur la biocénose de l’apprenance, plus particulièrement sur les rôles et relations entre les sujets aux moments critiques de la vie d'une communauté, selon le modèle de Tuckman (1965).

L’observation longitudinale s'est déroulée pendant 11 mois (de septembre à juillet), au cours de l'année universitaire 2005-2006. Avec l'accord des responsables de la formation, dès le début de l'année universitaire, les étudiants avaient été informés de la recherche en cours. Ils en connaissaient l'objet et savaient que les échanges via les forums de la plate-forme Moodle du campus virtuel et la liste de diffusion du DESS créée par l'université feraient partie des matériaux utilisés pour la recherche. Ils avaient été informés de l'indépendance de la recherche et que surtout aucune information de nature à favoriser ou à compromettre les évaluations académiques liées aux unités d'enseignement ne seraient transmises à l'équipe pédagogique. En fin d’année universitaires, les étudiants avaient à répondre à deux questionnaires l’un centré sur le travail collectif (« A votre avis, quelles sont les attitudes favorables/défavorables au travail collectif ? » , « Dans votre groupe, qui a eu une attitude favorable/défavorable au travail collectif ? »), l’autre sur le flow.

Sur les 22 étudiants de la promotion, 12 étudiants (tous salariés, âge moyen 36 ans, 83% cadres, 58% secteur privé) ont répondu au premier questionnaire.

Seuls 5 étudiants (parmi les 12) ont répondu au questionnaire spécifiquement centré sur le flow.


Discussion

La méthode mise en oeuvre pour distinguer les étudiants perçus comme ayant une attitude favorable au travail collectif n'a pas permis d'attendre l'objectif visé : nous avons constaté a posteriori que tous les étudiants n'avaient pas nécessairement tous travaillé ensemble, car la composition des groupes (constitués librement) était relativement stable. Il aurait certainement été prudent de réaliser un sociogramme afin de pouvoir mieux apprécier les résultats. En fait, seuls les étudiants ayant un comportement peu appréciable ont progressivement été connus de tous (c’est notamment le cas de « Jafar »), car ceux qui avaient travaillé une fois dans un groupe avec lui évitaient par la suite de le rejoindre : de ce fait, progressivement au cours de l'année universitaire, Jafar a été identifié par pratiquement tous les étudiants de la promotion du DESS comme ayant une attitude défavorable au travail collectif.

Le faible nombre de répondants, ainsi que l'empirisme de la mise en évidence de la perception du flow limitent la portée des résultats de cette étude exploratoire : il serait très opportun de prévoir de futures études en impliquant des effectifs plus importants et en élaborant par exemple, une échelle de mesure adaptée de « Flow State Scale-2 » (Jackson et Eklund, 2002 ; Fournier et coll., 2007), « Dispositional Flow Scale-2 » (Jackson et Eklund, 2002) ou « Flow-Kurzskala » (Rheinberg et coll., 2003).

Ces remarques liminaires faites, nous constatons que les résultats confirment les observations de l'étude ethnographique longitudinale (Heutte et Casteignau, 2006). En effet, dans leurs commentaires, les répondants déclarent souvent être très surpris par l’efficacité du travail collaboratif : dès qu’ils ont l’occasion de constater que le résultat du travail du groupe dépasse de beaucoup ce qui aurait été obtenu par une simple juxtaposition coopérative des contributions de chacun, cette prise de conscience provoque parfois une sorte de choc émotionnel. Ceux-ci reconnaissent que par la suite, ils s’investissent bien au-delà de ce qu’ils avaient envisagé, un peu comme s’ils étaient grisés par le sentiment d’efficacité collective du groupe.

Certains évoquent, de façon très explicite, le sentiment d’avoir été portés par une sorte d’euphorie qui favorise implication et concentration, tout en faisant perdre la notion du temps6. L’évocation de cette émulation collective à son paroxysme au moment de terminer le travail du groupe correspond en tous points à cet état optimal de l’expérience humaine que Csikszentmihalyi (1990, 2004) appelle le flow.

Cette expérience est si gratifiante qu’elle justifie à elle seule que ceux qui l’ont vécu (au moins une fois) se donnent parfois beaucoup de mal pour réunir toutes les conditions afin de pouvoir la revivre à nouveau.

Sans en être la seule explication, le flow permet sans doute de mieux comprendre comment, et peut-être encore plus pourquoi, des adultes peuvent consacrer, de façon volontaire, en plus de leurs activités professionnelles hebdomadaires, plusieurs dizaines d’heures par semaine de leur temps personnel à leur formation permanente. Ainsi, dans des conditions de formation aussi extrêmes (formation à distance via Internet, présentiel limité à quelques jours dans l’année universitaire), paradoxalement, cette formation, qui extérieurement paraît déshumanisée, est a posteriori ressentie par de nombreux étudiants comme une aventure humaine extraordinaire.

Certains d’entre eux semblent par ailleurs présenter des caractéristiques identifiées par Pielstick (2000) pour les leaders informels (respectueux des autres, bonne capacité d’écoute, souci de justice…) ; par Mallein (2001) pour les pragmatiques du changement (ouverture, souplesse, négociation…) ou encore par Csikszentmihalyi (2004, 2005) pour les individus autotéliques (curiosité/intérêt désintéressé, absence de préoccupation à propos du soi, conscience d’appartenir à une dimension plus vaste que soi-même…). L’observation de ces communautés d’apprentissage met en évidence que la présence de ces individus dans les groupes est essentielle pour garantir la cohésion du collectif. Ils sont souvent peu démonstratifs au démarrage du travail du groupe. Ils émergent plus particulièrement dans des circonstances où il y a risque de blocages : quand, afin de garantir durablement la contribution de tous, il est essentiel que les décisions soient prises en préservant l’intégrité de chacun des membres (recherche de consensus). Dans des commentaires libres, nombreux sont ceux qui affirment avoir cessé de collaborer dans un groupe, dès qu’ils ont estimé avoir été traités injustement. Cela est généralement lié au sentiment de n’avoir jamais pu se faire entendre au moment de la prise de décision collective.

Les caractéristiques dispositionnelles des « catalyseurs de l'efficacité collective » (Heutte, 2005) semblent pouvoir être particulièrement bien éclairées par les travaux concernant l’auto-efficacité (Bandura, 1986, 2002, 2003), ou encore l’autotélisme, l'expérience optimale et le flow (Csikszentmihalyi, 1975, 1990). Ces éléments influent fortement sur l'engagement, la motivation en formation (Fenouillet, 2001, 2003, 2009) et l'agentivité7 (Bandura, 1986) de chacun des membres du groupe, ils favorisent de ce fait grandement le développement des compétences professionnelles (Carré, 2001).

L’autotélique : épicurien de la connaissance ?

Selon Pauchant et Chennoufi (2003) les personnes autotéliques considèrent - entre autres - les crises comme des opportunités d'apprentissage et de changement. Tous ces éléments font vraisemblablement partie des conditions indispensables pour permettre le déploiement d’une écologie de l’apprenance au sein des collectifs humains. L’individu autotélique pourrait être un excellent catalyseur de l’efficacité collective.

Si apprendre est rarement une partie de plaisir, comprendre (faire comprendre, être compris…) peut être totalement jubilatoire (Heutte, 2007). Si ceux qui connaissent le flow sont souvent débordants d’activité, ne comptant jamais leurs heures, toujours prêts à innover ou s’impliquer dans un nouveau projet, c’est tout simplement parce qu’ils cherchent en permanence n’importe quelle occasion de recréer les conditions qui vont leur permettre de le ressentir à nouveau. Comme ils ont une meilleure santé émotionnelle (Amherdt, 2004, 2005), ils sont dans des dispositions qui les rendent souvent beaucoup plus créatifs : l’engagement dans un processus créatif donne la sensation de vivre plus intensément, permet de ressentir un « sentiment de plénitude que nous attendons de la vie et qui nous est si peu souvent offert. Seuls la sexualité, les sports, la musique et l’extase religieuse […] nous confèrent un sentiment aussi profond d’appartenance à un tout plus vaste que nous-mêmes. » (Csiksentmihalyi, 2006).

Ainsi, pouvons-nous considérer que certains se régalent du savoir, de la connaissance et surtout de la compréhension (du plaisir de s’apercevoir que l’on comprend) dans un rapport presque charnel au savoir !

Parmi tous les boulimiques du savoir, nous admettrons (poétiquement) que l’épicurien de la connaissance se régale aussi (et peut-être encore d’avantage) du partage et de la construction de connaissances avec d’autres. Ainsi, au croisement du « gai savoir » (Pineau, 2009) et du « jamais sans les autres » (Carré, 2005), comprendre, comme d’autres plaisirs, serait ainsi encore plus jouissif à plusieurs…



Conclusion

Tout au long de cette étude exploratoire, nous avons observé l’émergence de l’auto-efficacité et du flow dans des communautés d’étudiants, ainsi que des éléments attestant de l’engagement et de l’implication des étudiants dans des travaux collectifs. Sans oublier les réserves méthodologiques émises précédemment, nous estimons avoir mis en évidence toutes les caractéristiques du flow, telles quelles sont décrites par Csikszentmihalyi (1975, 1990), ainsi que certains aspects concernant le bien-être, le sentiment d’efficacité personnelle et le sentiment d’efficacité collective.

Cependant, en dernière analyse, émerge une variable que nous n’avions pas intégrée dans nos hypothèses au départ de cette étude : le sentiment d’appartenance. En effet, au fur et à mesure du recueil et du traitement des données (via questionnaires et échanges directs avec certains étudiants), il nous a semblé percevoir un lien important entre le sentiment d’appartenance (Baumeister, et Leary, 1995 ; Richer, et Vallerand, 1998 ; Ryan et coll., 1994) et l’implication des étudiants dans le travail collectif.

Nous avons souvent perçu la rancœur et l’amertume de l’étudiant dès qu’il ne se sent pas « accepté » par le groupe, ce qui généralement le dissuade de persister dans ses efforts pour contribuer au travail collectif (prétexte très souvent évoqué). A contrario, l’étudiant peut se sentir littéralement « porté par le groupe », porté par le flow et sentiment de vivre une expérience optimale, notamment du fait que ses choix sont respectés (ou suivis) par le groupe (ce qui conforte son besoin d’autonomie8), ainsi que par des feedbacks positifs du groupe quant à la qualité de ses contributions (ce qui conforte son besoin de compétence). La conjugaison de ces trois besoins psychologiques de base (Ryan, 1995 ; Deci et Ryan, 2000, 2008) a une incidence sur le bien-être et la motivation de l’étudiant (Deci et Ryan, 2000, 2008 ; Ryan et Deci, 2000), condition essentielle de la persistance dans les efforts pour partager, acquérir et construire des connaissances dans les collectifs, dans la mesure où elle « pousse » l’étudiants à s’impliquer au-delà de ce qu’il aurait réalisé s’il était seul9. Il va par exemple s’impliquer dans des tâches pour lesquelles il ne manifestait au départ pas nécessairement de motivation intrinsèque (Deci et Ryan, 1991 ; Ryan, 1993), mais qu’il accepte d’effectuer parce qu’il en a saisi l’intérêt pour lui-même, au cours de l’activité10. La motivation extrinsèque intégrée est basée sur le fait que l'étudiant a pleinement intégré la valeur du comportement11 (Deci et Ryan, 2000, 2008 ; Ryan et coll., 1992), notamment, pour maintenir activement son appartenance à ce groupe qui contribue à satisfaire grand nombre de ses besoins12.

Le sentiment d’appartenance sociale pourrait donc avoir un impact essentiel sur les deux autres besoins psychologiques de base : le sentiment d’autonomie et le sentiment de compétences serait ainsi mieux éprouvés en présence d’autrui, et perçus de façon bien plus favorable dans le cas d’affiliation(s) positive(s).

Cela permet de remettre très fortement en cause les modèles technocentrés, pédagogiquement et économiquement essentiellement basés sur l’investissement dans des infrastructures et la production de ressources numériques13. Car au-delà de la qualité des infrastructures et des ressources, la réussite de ces dispositifs est certainement plutôt liée à la qualité des relations interpersonnelles14, notamment entre les étudiants (Ryan et Powelson, 1991), mais aussi avec les enseignants (Ryan et coll., 1994). Le challenge serait donc le suivant : dans le contexte de la formation à distance, comment stimuler et maintenir le sentiment d’appartenance sociale des étudiants, mais aussi vraisemblablement celui des enseignants ?

Compte tenu des limites de cette étude, nous n'avons pu qu’effleurer la dimension psychosociale de l’apprenance (Carré, 2005). Cependant, il nous semble intéressant, dans l'avenir, d'explorer des rapprochements possibles entre les trois théories motivationnelles majeures que sont l’autodétermination, l’autotélisme et l’auto-efficacité (sans nier les différences conceptuelles entre ces trois grandes théories du self), considérant notamment le sentiment d’appartenance sociale comme étant le besoin psychologique de base qui constitue le premier pas de soi (du self) vers un autre que soi (donc vers le collectif).

Ainsi, une piste de recherches futures consistera à explorer les liens entre le sentiment d’appartenance sociale, le flow, le sentiment d’efficacité personnel et le sentiment d’efficacité collectif de groupes d’étudiants ainsi que l’impact de ces variables sur la motivation des étudiants, notamment leur engagement et leur persistance dans les études supérieures (Bourdage, 1996).

Cela pourra certainement faire progresser la recherche en éducation dans l’enseignement supérieur et notamment, pour peu qu’elle ait droit de cité en France, la pédagogie universitaire (Adangnikou, 2008, Donnay et Romainville, 1996 ; Dupont et Ossandon, 1994 ; Rege Colet et Romainville, 2006 ; Romainville, 2004).


Références

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1 « Autotélique » est un mot composé de deux racines grecques : autos (soi-même) et telos (but).

2 À l’époque (2006), peu de connaissances concernant le flow avaient réellement atteint la communauté scientifique française. Demontrond-Begr et Fournier et évoquent même «l’absence de publications scientifiques francophones sur ce concept » (2008, p. 10), dans les première pages de leur revue de littérature relative au flow dans le domaine du sport, ce qui est un peu restrictif dans la mesure où un article traduit et adapté en français (par Mario Lucas) de Csiksentmihalyi et Patton paraît dans la revue québécoise de psychologie en 1997, ainsi que trois ouvrages de Csiksentmihalyi publiés en France, en 2004 (« Flow : the psychology of optimal expérience » (1990), traduit, adapté et mis à jour par Léandre Bouffard), en 2005 et 2006 (respectivement « Finding Flow » (1997) et « Creativity » (1996) traduits par Claude-Christine Farny).

3 Mignotte (2004) indique que « le mot réseau se construit au travers une longue filiation venant, d'une part des termes en vieux français de résel (12ème s.), réseuil (15ème s.) et réseul (16ème s.) (voir le mot actuel résille), désignant une sorte de rets, de filet, dont les femmes, à la Renaissance, se coiffaient ou disposaient par-dessus leur chemise en guise de soutien-gorge, et d'autre part du latin "retiolus", diminutif de "retis", "petit filet", terme technique et populaire à la fois, mais mal fixé, peut-être emprunté au toscan. Le filet de l'Antiquité est quant à lui composé de fils régulièrement entrelacés, et servait à capturer certains animaux (…). On signalera également que le terme rets vient de l'indo-européen ere, qui signifie séparé, qui a des intervalles, alors que l'allemand Netz et l'anglais Net, viennent de ned : le noeud. Cette particularité sémantique révèle, d'emblée, tout le paradoxe d'un réseau inscrit dans la problématique duale "distance – différence", écartelé entre le connu et l'inconnu, entre un "ici", du "plein" et un "ailleurs", du "vide". »

4 http://www-tic.unilim.fr

5 Écosystème : Unité fondamentale d’étude de l’écologie composée de l’association formée des communautés des espèces vivantes (biocénose) et d’un environnement physique (biotope) en interaction permanente. (Petit Larousse illustré)

6 « Les deux derniers jours de l'UE 165 ont été véritablement le summum de ma formation. Je comprenais le truc à fond […]. J'ai débloqué la situation quand cela a été nécessaire. J'avais vraiment l'impression de maîtriser le truc et surtout d'avoir une action d'entraînement sur le groupe. Le moment le plus fort a été quand, un vendredi soir (alors que le rendu était pour le dimanche), on a travaillé en groupe jusqu'à une heure du matin pour refondre entièrement ce que nous avions fait précédemment (travail très intense). J'ai poursuivi seul, et le lendemain à 6h du matin, j'étais sur mon micro et je formalisais l'enchaînement des actions. Quand j'ai eu proposé le truc, c'est effectivement ce qu'il fallait. La reconnaissance de mes camarades a été une conséquence sans plus. C'est surtout le sentiment d'être porté par les dieux. J’ai ressenti exaltation, enthousiasme, impression de pouvoir tenir des siècles sur le travail en cours... […] Je n'ai jamais essayé la cocaïne, mais je pense que ce doit être le résultat d'une prise ou alors le sentiment qui prédomine après l'amour quand le couple à fonctionné en symbiose (plaisir sexuel perso + plaisir sexuel du partenaire) […] on est responsable de soi, et on "doit" quelque chose aux autres. Je connais les objectifs, ils sont partagés par tous. En ce sens il y a symbiose du groupe […] c’est un sentiment qui se communique et se partage » (Hubert)

7 Agency  : le fait d’exercer une influence personnelle sur son propre fonctionnement et sur son environnement (Bandura, 1986). « Puissance personnelle d’agir », selon Ricoeur (2000), cité par Jacques Lecomte, le traducteur de l’ouvrage d’Albert Bandura, Auto-efficacité, le sentiment d’efficacité personnelle, paru en 2003.

8 Selon la TAD, autonomie n’est pas synonyme d’indépendance : « Nous entendons par autonomie le fait, pour un individu, d’agir en exerçant sa volonté et son libre choix ; l’indépendance signifie plutôt qu’un individu fonctionne seul et sans compter sur les autres. » (Deci et Ryan, 2008)

9 « dépassement de soi pour la réussite du groupe » (Juliette)

10 « Toute seule, j'ai conscience que je n'aurais pas travaillé autant, que j'aurais parfois décroché. Là, je ne pouvais pas me le permettre, par rapport aux autres » (Géraldine)

11 « J'ai eu l'impression d'aller au-delà de ce qui m'était demandé mais de le faire pour le groupe et pour moi en même temps » (Juliette)

12 « […] j'ai appris beaucoup de la participation et de l'expérience des autres et leur participation me motivait à participer aussi afin de rester dans le flot et ne pas me sentir écartée. » (Géraldine)

13 Confusion simpliste et démagogique (mais politiquement très efficace) entre innovation technologique et innovation pédagogique, comme ci l’une induisait naturellement l’autre. Dans cette vision très réductrice de l’enseignement, il s’agit le plus souvent plutôt d’un appareillage technologique destiné à favoriser le e-teaching (au sens de dispositifs conçus pour enseigner) dont l’efficacité reste à prouver (encore faudrait-il que les enseignants se servent effectivement de ces ressources…) qu’à proprement parler de e-learning (au sens de dispositifs conçus pour que les étudiants apprennent…).

14 Selon Umbriaco et Gosselin, (2001), l’efficacité de ces dispositifs pourrait d’ailleurs être liée aux émotions



Sources :

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Heutte (2010)
AIPU 2010

Heutte J. (2010) - Mise en évidence du flow perçu par des étudiants au cours d’un travail collectif en ligne : Homo sapiens retiolus est-il un épicurien de la connaissance ?
26ème congrès de l’Association Internationale de Pédagogie Universitaire (AIPU) « Réformes et changements pédagogiques dans l’enseignement supérieur », Rabat, 17-21 mai 2010


Documents joints

Heutte (2010)
Heutte (2010)