Équité et qualité dans l’éducation - Comment soutenir les élèves et les établissements défavorisés : Coup de projecteur sur la France (OCDE, 2012)

mardi 11 septembre 2012
par  Jean Heutte
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Réduire l’échec scolaire est payant pour la société et les individus. Elle peut également contribuer à la croissance économique et au développement social. En effet, les systèmes éducatifs les plus performants parmi les pays de l’OCDE sont ceux qui conjuguent qualité et équité. L’équité en matière d’éducation implique que les circonstances personnelles ou sociales telles que le genre, l’origine ethnique ou le milieu familial ne sont en aucun cas des obstacles à la réalisation du potentiel éducatif (équité) de chaque individu et à ce qu’ils atteignent un niveau de compétences minimales de base (inclusion). Dans ces systèmes éducatifs, une très grande majorité d’élèves ont la possibilité d’acquérir des compétences élevées, indépendamment de leurs circonstances personnelles et socio-économiques.

Les pays de l’OCDE sont confrontés au problème de l’échec scolaire et du décrochage
Dans les pays de l’OCDE, près d’un élève sur cinq n’atteint pas le niveau de compétences minimales de base indispensable pour fonctionner dans la société d’aujourd’hui (ce qui dénote un manque d’inclusion). La probabilité que les élèves issus de milieux socio-économiques modestes soient peu performants est deux fois plus forte, ce qui signifie que les circonstances personnelles ou sociales sont des obstacles à la réalisation de leur potentiel éducatif (ce qui dénote un manque d’équité). Le manque d’inclusion et d’équité peut aboutir à l’échec scolaire, dont le décrochage est la manifestation la plus visible. Environ 20% de jeunes adultes décrochent du système scolaire sans avoir terminé le deuxième cycle de l’enseignement secondaire.

Il est rentable d’améliorer l’équité et de réduire l’échec scolaire
Les coûts économiques et sociaux de l’échec scolaire et du décrochage sont élevés. En revanche, l’achèvement réussi de l’enseignement secondaire permet aux individus d’améliorer leurs perspectives d’emploi et de mener une vie saine, et se traduit également par plus d’investissements publics grâce à une hausse de l’impôt. L’amélioration des qualifications des individus contribue à l’émergence de sociétés plus démocratiques et d’économies plus durables, tout en réduisant leur dépendance à l’égard des structures d’aide publique et leur exposition aux récessions. Les sociétés dont la population est qualifiée sont mieux préparées à affronter la crise actuelle et les futures crises potentielles. Investir dans l’enseignement pré-primaire, primaire et secondaire pour tous, et en particulier pour les enfants issus de milieux défavorisés, est une mesure équitable et en même temps économiquement rentable.

Politiques d’investissement dès la petite enfance et tout au long de l’enseignement secondaire supérieur
Sur le chemin de la reprise économique, l’éducation est devenue un élément central des stratégies de croissance des pays de l’OCDE. Pour être efficaces à long terme, les progrès en matière d’éducation doivent permettre à tous les élèves d’avoir accès à une éducation de qualité dès la petite enfance, de rester dans le système au moins jusqu’à la fin de l’enseignement secondaire supérieur et d’obtenir les compétences et le savoir indispensables pour une intégration réussie sur le marché du travail et social.

L’une des stratégies éducatives les plus efficaces pour les gouvernements consiste à investir dès la petite enfance et jusqu’au deuxième cycle de l’enseignement secondaire. Les politiques qui ont pour objet de s’assurer que tous les élèves atteignent au moins un niveau minimal de compétences à la fin de l’enseignement secondaire sont essentielles pour l’avancement des individus et le progrès social, et les bénéfices de ces investissements l’emportent sur les coûts. Les gouvernements peuvent prévenir l’échec scolaire et réduire le décrochage en recourant à deux approches parallèles : cibler les établissements défavorisés peu performants et éliminer les pratiques de niveau systémique qui nuisent à l’équité. Cependant, afin de permettre aux élèves de réussir, les politiques en matière d’éducation doivent être alignées sur d’autres politiques gouvernementales telles que le logement ou les prestations sociales.

Rompre avec les politiques systémiques qui nuisent à la performance des établissements et des élèves
La manière dont les systèmes éducatifs sont conçus peut accentuer les inégalités et avoir un impact négatif sur la motivation et l’investissement des élèves dans leur scolarité, les conduisant parfois au décrochage scolaire. À l’échelle des systèmes éducatifs, l’élimination des obstacles à l’équité est souhaitable pour le bien des élèves défavorisés et ne compromet nullement la progression de leurs camarades. Cinq mesures peuvent contribuer à prévenir l’échec scolaire et faciliter l’achèvement des études secondaires de deuxième cycle :

1. Éliminer le redoublement
Le redoublement est une pratique non seulement coûteuse, mais également inefficace pour améliorer les résultats scolaires. Il existe des stratégies alternatives, consistant notamment à prévenir le redoublement en palliant les lacunes à mesure qu’elles sont identifiées durant l’année scolaire ; à privilégier le passage automatique au niveau supérieur ou à limiter le redoublement aux matières ou modules dans lesquel (le)s l’élève a échoué, en lui assurant parallèlement un soutien personnalisé ; et enfin à sensibiliser les parties prenantes, traditionnellement acquises au redoublement, aux implications négatives de cette pratique. Pour appuyer ces stratégies, des politiques complémentaires doivent permettre aux établissements et aux enseignants de renforcer leurs capacités à répondre aux besoins d’apprentissage des élèves, en leur apportant dès que nécessaire un soutien régulier. Réduire la fréquence des redoublements suppose également d’informer les acteurs de l’éducation et la société au sens large des coûts de cette pratique et de son impact négatif sur les élèves ; de définir des objectifs ; et de proposer aux établissements des mesures incitatives adéquates.

2. Reporter l’orientation et la sélection des élèves au deuxième cycle du secondaire
La sélection précoce a un impact négatif sur les élèves assignés aux filières de second ordre et aggrave les inégalités, sans pour autant améliorer la performance moyenne. Cette pratique devrait donc être reportée au deuxième cycle de l’enseignement secondaire en privilégiant auparavant les cursus d’enseignement général. Dans les contextes où ce changement s’annonce difficile, la suppression des filières ou classes de second ordre permet d’atténuer les effets négatifs de l’orientation et de la sélection précoces. Limiter le nombre de matières ou la durée des cours dispensés par classes de niveau, faciliter les changements de filière ou de classe et veiller à la qualité de l’enseignement dispensé dans les différentes filières sont autant de moyens de minimiser l’impact négatif de l’orientation précoce, de la répartition en classes homogènes et de la formation de groupes de niveau.

3. Encadrer les choix d’établissement de façon à prévenir la ségrégation et l’aggravation des inégalités
Laisser les parents entièrement libres de choisir l’établissement dans lequel ils souhaitent inscrire leur(s) enfant(s) risque d’entraîner une ségrégation des élèves par niveau d’aptitude et/ou origine socio-économique, donc d’aggraver les inégalités au sein des systèmes éducatifs. Les dispositifs de choix d’établissement peuvent être conçus et gérés de manière à trouver un juste équilibre, en offrant aux parents un choix d’établissements tout en limitant l’impact négatif de ce choix sur l’équité. Il existe différentes options ; la mise en place de programmes de choix encadré permet de concilier liberté de choix des parents et répartition plus homogène des élèves. Par ailleurs, différentes stratégies permettent d’assurer cette répartition homogène : mesures incitant les établissements les plus performants à accueillir des élèves défavorisés ; dispositifs de choix d’établissement assortis de chèques-études ou de crédits d’impôt. Les politiques doivent également aider les familles défavorisées à obtenir des informations sur les établissements pour pouvoir prendre une décision éclairée.

4. Adapter les stratégies de financement aux besoins des élèves et des établissements scolaires
Le montant et l’affectation des ressources disponibles déterminent les opportunités d’apprentissage des élèves. Pour assurer l’équité et la qualité au sein des systèmes éducatifs, les stratégies de financement doivent : garantir l’accès à des structures d’éducation et d’accueil de la petite enfance de qualité, en particulier pour les familles défavorisées ; et intégrer des modes de calcul reflétant le fait que le coût d’instruction des élèves défavorisés peut être plus élevé (à l’aide de formules pondérées, notamment). Il convient par ailleurs de concilier décentralisation/autonomisation locale et gestion transparente des ressources, pour s’assurer que celles-ci sont allouées aux établissements et aux élèves qui en ont le plus besoin.

5. Garantir l’équivalence des filières dans le secondaire de deuxième cycle pour éviter le décrochage
L’enseignement secondaire de deuxième cycle est un niveau stratégique pour les individus et les sociétés ; or, entre 10 et 30 % des inscrits ne parviennent pas à achever ce cycle d’études. Améliorer la qualité et la structure de l’enseignement secondaire de deuxième cycle permet de garantir son adéquation aux attentes des élèves et d’inciter ces derniers à persévérer. Il existe à cet effet différentes stratégies : veiller à ce que les options générales et professionnelles soient de valeur équivalente en améliorant la qualité de l’enseignement et de la formation professionnels, en facilitant le passage de l’enseignement général à l’enseignement professionnel et en éliminant les impasses ; mieux informer et mieux conseiller les élèves et prendre des mesures ciblées pour éviter le décrochage – consistant par exemple à mettre en place des cycles d’études débouchant sur une qualification de l’enseignement secondaire de deuxième cycle ou à inciter les élèves à poursuivre leurs études jusqu’à la fin du secondaire.

Aider les établissements scolaires et les élèves défavorisés à améliorer leurs performances
Plus les établissements accueillent une forte proportion d’élèves défavorisés, et plus ils sont susceptibles de rencontrer des problèmes pouvant nuire aux performances des élèves, ce qui affecte les systèmes éducatifs dans leur ensemble. Les établissements défavorisés peu performants manquent souvent de capacités ou de soutien interne(s) pour améliorer leurs performances ; en effet, les chefs d’établissements, les enseignants, l’école, la classe et les environnements extrascolaires concourent rarement à offrir une expérience d’apprentissage enrichissante aux plus défavorisés. Cinq mesures ont apporté la preuve de leur efficacité pour améliorer les performances des établissements défavorisés :

1. Renforcer et soutenir la direction des établissements
Les équipes de direction doivent être à l’origine de la transformation des établissements défavorisés peu performants ; toutefo


Sources :
OCDE (2012). Équité et qualité dans l’éducation - Comment soutenir les élèves et les établissements défavorisés : Coup de projecteur sur la France
http://www.oecd.org/edu/equity

OCDE (2012). Regards sur l’éducation
- Source d’informations précises et pertinentes, Regards sur l’éducation : Les indicateurs de l’OCDE fait figure de publication de référence sur l’état de l’éducation dans le monde. Elle fournit des données sur la structure, le financement et les performances des systèmes d’éducation des 34 pays membres de l’OCDE, ainsi que d’un certain nombre de pays du G20 non membres de l’Organisation.
- Avec plus de 140 graphiques, 230 tableaux et 100 000 chiffres, Regards sur l’éducation présente des données clés sur : les résultats des établissements d’enseignement ; l’impact de l’apprentissage dans les différents pays ; les ressources humaines et financières investies dans l’éducation ; l’accès, la participation et la progression au sein des systèmes d’éducation ; et l’environnement pédagogique et l’organisation scolaire.

http://www.oecd.org/fr/edu/rse2012.htm

Charbonnier, O. (2012). Des jeunes de plus en plus déscolarisés et des maternelles surchargées, in David Davidenkoff, Chronique Question d’éducation, France Info, 11 août 2012.

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Charbonnier, O. (2012). L’université française en progrès, in David Davidenkoff, Chronique Question d’éducation, France Info, 12 août 2012.

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